Les Fêtes franco-russes au "Figaro"
C'est, encore une fois, à la cinématographie que ce miracle est dû.
Tout le monde, disait un adage ancien, ne peut pas aller à Corinthe. De même sont nombreux ceux qui ne purent aller à Dunkerque, ni à Reims, ni à Bétheny !
Et comme, parmi ceux-là aussi, le Figaro compte beaucoup d'amis, nous avions eu l'idée de faire réaliser pour eux, aux moyen du cinématographe, quelques "instantanés" de ces superbes spectacles.
La représentation leur en a été donnée, hier soir, au foyer du Figaro.
Toutes les vues présentées ont été prises par les établissements Pathé frères, et ce fut là un véritable tour de force, si l'on ne rappelle les conditions particulièrement défavorables dans lesquelles fut exécuté ce travail : mer mauvaise à Dunkerque, jour gris et temps pluvieux un peu partout. La perfection des pelliculas et de l'outillage emplyé, l'habilité des procédés d'exécution ont permis de venir à bout de ces difficultés : le cinématographe Pathá a vraiment réalisé pour nous, pendant une demi-heure, la vision même des spectacles d'hier :
D'abord, la revue navale de Dunkerque, la vue de la foule entassé au long des quais ; puis la visite à Reims ; l'arrivée du cortège impérial au seuil de la cathédrale ; puis, à Bétheny, les mouvements de troupes, les galops des escortes, le défilé, sur le front de la tribune où s'entasse et s'agite un public enthousiaste, des voitures officielles, en tête desquelles apparaissent, très reconnaissables, les silhouettes vivantes de nos hôtes impériaux ; et enfin, la charge finale - aperçue au fond du tableau dans la réalité saisissante de son mouvement !
On a dit avec raison que, grâce aux progrès de la science moderne, il n'y avait plus de distance. On devrait ajouter qu'à présent, grâce aux cinématographe, il n'y a plus d'absence.
Tous les Parisiens, dans quelques semaines, pourront dire qu'ils ont vu Dunkerque et qu'ils étaient à Bétheny. Fabien.
Le Figaro, Paris, mardi 24 septembre de 1901, p. 2.