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GRUPO DE REFLEXIÓN SOBRE EL MUNDO HISPÁNICO

CHERBOURG

Jean-Claude SEGUIN

Cherbourg, ville du département de La Manche (France), compte 38 554 habitants (1894).

1896

La Loterie Grenier (Place Divette, [7] juin-12 juillet 1896)

Le forain Ernest Grenier est un habitué de la foire de Cherbourg, mais cette année, il présente une nouveauté, le kinetoscope Edison :

Loterie Grenier
Nous annonçons l'arrivée à Cherbourg de la Loterie Grenier.
Cet établissement n'est pas inconnu pour le s Cherbourgeois. En effet, tous les ans, à pareille époque, la Maison Grenier vient nous apporter quelque divertissement nouveau.
Outre la part qu'on pourra prendre à la loterie alphabétique, on aura le plaisir d'entendre les phonographes, dont le répertoire, complètement renouvelé, se compose de plus de 200 morceaux d'opéras, chansonnettes, monologues, etc.
Les vues animées du Kinétoscope, feront également la récréation du public.
L'établissement est entièrement éclairé à la lumière électrique. — Un moteur de la force de 4 chevaux actionne un dynamo qui dégage une lumière dont l'intensité fera contraste avec les becs de gaz de la place Divette.


La Vigie de Cherbourg et de la Manche, Cherbourg, 4 juin 1896, p. 3.

Du répertoire du kinétoscope, nous ne connaissons qu'un seul titre, paru dans la presse : 

Loterie Grenier
Tous les soirs, grande tombola gratuite.
Nouveau répertoire de 100 morceaux aux phonographes, 0 fr. 10 l'audition.
Pour voir le Kinétoscope-Une scène dans un bar-0 fr. 15.


La Vigie de Cherbourg et de la Manche, Cherbourg, 25 juin 1896, p. 3.

La presse relaye fréquemment la présence de la loterie Grenier et de ses appareils :

PLACE DIVETTE
Kinétoscope, Phonographes et loterie Grenier
Parmi les jolis établissements forains qui pendant ce mois de juin égayaient notre place Divotte celui de M. Grenier est sans contredit l'un de ceux qu'on regrettera le plus de voir nous quitter.
En effet rien de plus charmant tous les soirs que le brillant éclairage électrique de cet établissement important qui comprend trois genres de divertissement» bien distincts et dont chacun rencontre chaque jour un vif et légitime.
La loterie alphabétique si intelligemment tenue par l'aimable Mme Grenier est remarquable par le nombre et la beauté de ces lots dont un nouveau choix est sur le point d'arriver.


La Vigie de Cherbourg et de la Manche, Cherbourg, 7 juillet 1896, p. 3.

C'est finalement le 12 juillet 1896 que la loterie Grenier présente pour la dernière fois son kinétoscope (La Vigie de Cherbourg et de la Manche, 11-12 juillet 1896, p. 3).

Le Cinéphotographe de Lagneau et Vernassier (Place Divette, [27] septembre-18 octobre 1896)

C'est M. Lagneau - secondé par Louis Vernassier - qui est le premier forain à offrir aux Cherbourgeois des images animées. Le Théâtre-Salon des Sciences, nom de son établissement, ouvre ses portes vers le 27 septembre 1896 sur la Place Divette. La Vigie de Cherbourg publie un article qui s'attarde sur le cinéphotographe, appareil cinématographique commercialisé à Paris, par C.J. Lépée :

PLACE DIVETTE
Le Cinéphotographe
Nous apprenons qu'un théâtre vient de se monter sur la place Divette, où les Cherbourgeois vont enfin pouvoir admirer le Cinéphotographe, cette dernière merveille de la Science moderne, qui fait en ce moment courir tout Paris.
Disons quelques mots de ce qui est le Cinéphotographe ou photographie animée : c'est la présentation de scènes parisiennes ou autres, photographies sur le vif en grandeur naturelle, mais qui sont animées par l'électricité, de façon à représenter aux spectateurs l'illusion de la réalité dans ses moindres détails.
ainsi, pour ne citer qu'un exemple, un train arrive en gare à toute vitesse avec vapeur locomotive et wagons, les employés courent, les voyageurs descendent, d'autres se disputent les places, les signaux, le chef de gare, tout y est et au naturel. C'est, comme on voit excessivement curieux.
D'autres tableaux représentent, des rues et boulevard de la Capitale, des scènes comiques, duels, descente de tramway, le Couronnement du Tsar, la Loïe Fuller et ses couleurs, des blanchisseuses lavant leur linge, etc., etc.
Nous ne doutons pas que cette nouveauté ne soit bien présentée, car le Théâtre Salon des Sciences possède une installation électrique modèle, contuie par un ex-contre-maître-mécanicien de Paris, choses indispensables pour le succès et la réussit de cette exhibition.
Ce spectacle, essentiellement scientifique et de haute moralité, sera certainement goûté des familles et apprécié à sa juste valeur.


La Vigie de Cherbourg, Cherbourg, 27 septembre 1896, p. 3.

Le spectacle est nouveau à Cherbourg, comme le laisse entendre le journaliste, et l'ex-contre-maître-mécanicien de Paris n'est autre que Louis Vernassier en personne. Il est de fait le véritable opérateur et responsable du cinéphotographe. Comme souvent, les titres restent difficiles à identifier, car les forains peuvent se servir aussi bien chez les éditeurs que chez des revendeurs comme Mendel où figurent au catalogue des vues de diverses provenances. Seul Le Couronnement du Tsar est plus aisément identifiable car son éditeur est l'Anglo-American photo-import Office, seule maison mettant à la vente un tel film. Mais un autre événément va éclipser pour quelques jours le cinéphotographe, c'est l'arrivée du Tsar de Russie et les fêtes qui vont avoir lieu à Cherbourg pour sa réception, le 5 octobre 1896. Quelque part dans la foule des photographes se trouve d'ailleurs l'opérateur Constant Girel de la maison Lumière. On lui doit deux vues cataloguées : Cherbourg : Débarquement des souverains russes et Cherbourg : Entrée des Souverains russes et du Président de la République sous le hall

cherbourg divette
Cliché G.B.P., Cherbourg, Place Divette (c. 1905)

La veille, La Vigie de Cherbourg a publié un article d'un journaliste qui est allé se rendre compte directement du fonctionnement de l'appareil cinématographique, et le moins que l'on puisse dire c'est qu'il a apprécié non seulement le spectacle, mais l'agencement des séances et la qualité technique des installations, hommage indirect au travail de Louis Vernassier :

PLACE DIVETTE
Le Cinéphotographe
Il nous a été donné d'assister à une séance du Cinéphotographe ; nous avons été émerveillés, car c'est vraiment curieux.
Les scènes sont bien choisies et surtout très morales ; tout le monde peut voir et même doit voir ce phénomène scientifique, qui est du plus grand intérêt.
Chose particulièrement agréable, c'est le peu d'entr'acte entre les tableaux : ceux ci se succèdent rapidement et évitent une attente trop longue qui nuirait au charme du spectacle.
L'installation électrique, placée en avant du théâtre, est très coquette et paraît installée dans des conditions irréprochables, car la pluie ayant occasionné un arrêt momentané de la machine, la séance, grâce à l'appoint d'une puissante batterie d'accumulateurs, n'en a pas été moins bien continuée à la satisfaction générale.
Matinées les jeudis et dimanches vers trois heures.


La Vigie de Cherbourg, Cherbourg, 4 octobre 1896, p. 3.

Le cinéphotographe, comme tout appareil cinématographique, nécessite un opérateur aguerri capable de prévenir les incidents éventuels. L'alimentation par l'électricité, qui n'est pas généralisée à l'époque, s'avère concluante. En outre, la dextérité de l'opérateur permet de limiter au maximum les temps morts entre les vues animées. Ajoutons à cela la remarque sur la moralité des vues présentées, ce qui sous-entend que ce type de spectacle n'a pas toujours soin de préserver les spectateurs, les jeunes en particulier. Par la suite, les articles que l'on retrouve dans la presse se limitent à répéter ce qui a déjà été dit. Le répertoire des vues est probablement bien limité - peut-être d'ailleurs n'y a-t-il qu'un seul programme - et les quelques titres que l'on retrouve le jour de la fermeture où déjà dû être proposés antérieurement :

PLACE DIVETTE
Le Cinéphotographe
Aujourd'hui dimanche, clôture de ce coquet établissement dirigé par M. Lagneau et qui, sous le nom de Cinéphotographe, met sous les yeux de ses spectateurs des vues photographiques de grandeur naturelle et des groupes dont chaque personnage apparaît animé et présente tous les aspects de l'action et de la vie : les uns marchant, les autres courant, dansant ou luttant.
Tous ceux qui ont vu ces curieux tableaux vont vouloir les admirer encore une fois ; et les retardataires seraient bien mal inspirés s'ils ne profitaient pas de ce dernier jour pour les aller voir.
L'arrivée d'un train, la danse auvergnate, les lutteurs, les blanchisseuses, la Loïe Fuller avec sa danse et sa robe aux couleurs changeantes, sont autant de merveilles que nous exhortons nos concitoyens à ne pas laisser partir sans les avoir contemplés et admirés.


La Vigie de Cherbourg, Cherbourg, 18 octobre 1896, p. 3.

Les Cherbougeois voient partir ainsi ceux qui leur ont proposé les premières vues animées présentées dans leur ville. Les deux forains, quant à eux, vont continuer leur tour en se rendant au Mans quelques jours plus tard.

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