COMMENTRY

Jean-Claude SEGUIN

Commentry, ville du département de l'Allier (France), compte 12.618 habitants (1894).

1896

Cinématographe Lumière (mai 1896)

C'est en mai 1896 que la mairie de Commentry reçoit une demande pour organiser des séances de cinématographe Lumière. Le courrier est reçu le 15 mai 1896 ,particulièrement précoce, et il porte la signature de M. Gallois, un opérateur qui vient d'organiser des séances à Nice, depuis le mois de février et qui se trouve à Bourgoin en mai 1896. Ainsi qu'on peut le lire, l'opérateur cherche un emplacement - il parle de " Casino " et d'une source électrique pour faire marcher son appareil.

commentry lumiere 1896

Gallois (Maison Lumière) à Mairie de Commentry, mai 1896
© Archives de la Mairie de Commentry

Le système Lumière nous conduit à penser que M. Gallois est probablement l'un des multiples concessionnaires de la maison Lumière. Nous ignorons si cette demande a été suivie d'effet, puisque la presse semble ne pas avoir relayé des informations relatives à des séances de cinématographe Lumière dans les semaines suivantes. Quant à M. Gallois, nous perdons sa trace.

Cinématographe Joly (Hôtel de Ville, <22->29 septembre 1896)

Le cinématographe Joly, quant à lui, arrive bien à Commentry en septembre 1896. L'appareil appartient à un tourneur qui vient, peut-être, de Moulins, mais dont nous ignorons le nom :

Commentry.-Le Cinématographe perfectionné, système Joly, est installé à Commentry à l'Hôtel-de-Ville, salle du Conseil, donnant tous les soirs des représentations avec changement de tableaux à partir de 7 h. 1/2 jusqu'au 11 h. du soir.


Le Centre, Montluçon, mardi 22 septembre 1896, p. 2.

C'est Le Journal de Montluçon qui fournit des informations sur le répertoire de vues animées :

Attraction
Le cinématographe perfectionné, système Joly, est installé à Commentry, à l'hôtel de ville, salle du conseil, donnant tous les soirs des représentations avec changement de tableaux, à partir de 7 h 1/2 et jusqu'à 11 h du soir. Scènes représentées : " Défilé d'un régiment " (musique en tête) ; " Assaut de boxe entre deux champions de Joinville " ; " Le Jardinier ou l'arroseur arrosé " ;  " Enfants jouant dans un bois avec d'autres personnes " ; " Arrivée d'un train en gare de Moulins " ; " Quadrille excentrique au Moulin-Rouge ".


Le Journal de Montluçon, Montluçon, 24 septembre 1896.

Les films sont parfaitement identifiables comme des bandes Joly - qui ont l'originalité d'avoir 5 perforations de chaque côté du photogramme - ou Pirou (le Quadrille excentrique au Moulin-Rouge pouvant correspondre à plusieurs films - à l'exception de la curieuse Arrivée d'un train en gare de Moulins. On pourrait croire que le tourneur a pris une vue dans la ville voisine de Moulins, mais il n'en est rien. Il se trouve que cela ne constitue qu'une technique commerciale, que l'opérateur va renouveler quelque temps plus tard, en novembre, à Clermont-Ferrand. Le tourneur y présente, en effet, une Arrivée d'un train en gare de Riom. La ficelle est grosse, mais très fréquente à l'époque.  Parmi les vues Joly-Normandin, il existe bien une Arrivée d'un train, mais c'est à Asnières, dans la région parisienne... D'ailleurs, suivant la même astuce, l'opérateur va transformer le titre Le Travail des forgerons en Le Travail des forgerons à Commentry... Les séances ne durent que quelques jours (Le Centre publie son entrefilet du 22 septembre jusqu'au 29 septembre 1896) et le tourneur poursuit son voyage, sans doute vers d'autres villes du centre de la France.

Le Cinématographe d'A. Milhès (décembre 1896)

C'est grâce à un nouveau document transmis à la mairie de Commentry que nous savons que l'une des figures les plus connues parmi les tourneurs des premiers temps, A. Milhès s'informe pour savoir si des séances peuvent être organisées dans la ville. Il écrit de Rethel où il est photographe. Il possède, lui aussi, un appareil Joly, même si cela n'est pas mentionné dans la lettre.  

commentry milhes 1896

A. Milhès à la Mairie de Commentry, décembre 1896
© Archives de la Mairie de Commentry

Outre les questions d'usage sur l'emplacement ou le local où pourrait être installé  le cinématographe, la fin du courrier est révélatrice du mode de fonctionnement du tourneur : " Egalement, je vous prie de me dire si quelqu'un de mes confrères a déjà donné, chez vous, des séances de Cinématographe. " Cela montre d'une part que la concurrence est rude et qu'A. Milhès suppose que d'autres cinématographes ont déjà organisé des séances, et d'autre part, que le tourneur a peut-être tout bonnement renoncé parce que la mairie avait dû lui répondre qu'en effet un cinématographe Joly, au moins, a organisé des séances deux mois avant. Sans doute, donc, le second rendez-vous manqué de 1896 pour Commentry. 

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